Eva ingénieure a qui tout sourit, rêve de changements. Sa vie ne correspond plus à ses idéaux, elle veut vivre de choses concrètes, ce qui la pousse à postuler à une annonce du conservatoire du littoral et de tout envoyer valser. Exit sa vie et place à l’aventure. Elle va vivre seule en immersion complète sur une île de 1,7 hectare à 4000 km du continent le plus proche, afin de réhabiliter une station météo et vivre en totale autonomie. Elle devra pendant 9 mois subvenir à ses besoins, ainsi que ceux de sa chienne « puce » qui l’accompagne dans cette folle aventure, en usant des principes du développement durable. Sur le papier c’est magique, mais la réalité est beaucoup moins glamour. Partir 9 mois avec 3 mois de denrées ne présage rien de bon, il va falloir se débrouiller et cultiver afin de subsister. Sa mission envoyer des photos montrant sont travail, c’est un peu une Robinson au féminin. Mais l’enchantement du début avec la faune, la nature luxuriante, la richesse des fonds marins, le calme, laisse place à la peur, au désarroi, aux doutes. Le rêve tombe et les difficultés dues au climat aride et à la nature hostile, ainsi que le manque de nourriture, ont raison de sa joie de vivre ! Malgré son courage sa force et sa ténacité c’est de plus en plus dur. L’histoire va prendre un tournant, quand, au loin elle aperçoit un bateau… et le titre prend quelques pages plus tard tout son sens. Elle va faire preuve de beaucoup d’abnégation pour sauver ses idéaux et s’en sortir.

Nous avions découvert Léonard Chemineau avec "Le travailleur de la nuit" et il a aussi fait parler de lui avec "La bibliomule de Cordoue". Des projets très différents et il change encore de style avec cet album très personnel qu'il a porté pendant plusieurs années. Toujours est-il que le trait très coloré qu'il a adopté ici fait merveille et amène un contraste bienvenu avec tous les ennuis que traverse son héroïne. Le scénario propose deux parties distinctes : l'arrivée sur l'île et la difficulté pour y vivre puis la lutte d'Eva contre la multinationale. C'est bien mené, on est plein d'empathie pour Eva et on souffre pour elle. Le dessin est magique, à la fois joyeux et coloré, sombre et dangereux comme les abysses. C’est beau, le rythme est soutenu et on ne peut lâcher ce livre fait avec du papier recyclé et des encres végétales, c’est une merveille.